Au début, vers 1946, il est simple dessinateur industriel, à la base des échelons, dans un bureau d’étude SNCF de la gare St Lazare.
Après quelques années, il a la chance de pouvoir obtenir une mutation à la gare d’Austerlitz-Valubert à la DETE, où l’on fait les plans des nouvelles locomotives électriques SNCF : la série des BB. Il travaille alors dans le bureau même où l’on conçoit les boggies moteurs des nouveaux engins. Au début il fait les plans sur les indications des ingénieurs SNCF dont dont MM.,Nouvion et Jacquemin. C’est l’époque du papier calque, du tire-ligne, de l’encre de chine et du grattoir en acier, modèle feuille de sauge.
Puis, son côté manuel venant à s’exprimer encore, il rend quelques services au bureau d’études en réalisant spontanément des très petites maquettes en 3 dimensions des nouveautés techniques dont la compréhension est bien plus facile que dans les 2 dimensions d’un simple plan. Grande satisfaction des ingénieurs et donc d’Henri.
Ce sera un virage important dans sa carrière SNCF et indirectement dans sa vie.
Puis, assez rapidement, il devient maquettiste officieux de ce BE (et probablement le seul maquettiste de toute la SNCF). Il obtient la jouissance exclusive d’un très petit atelier où il réalise les maquettes de tous les nouveaux prototypes de la BB, machine qui deviendra championne du monde de vitesse, à l’époque, vers 1960. Il ne retournera plus à la planche à dessin. Il fait partie d’une équipe, certes, mais, encore une fois dans sa vie : dans une situation où il est seul et où il s’y complait.
Atelier à la SNCF
La BB championne et le travail manuel sont très enthousiasmants pour lui, mais c’est aussi un cul de sac pour sa promotion. Il ne montera les échelons qu’à l’ancienneté, et plutôt péniblement. C’est surtout son épouse qui en concevra de la rancœur et le talonnera sans jamais aucun répit afin qu’il réclame sa promotion. Lui, il subira tout sans grogner ni contre sa hiérarchie, ni contre Gisèle. Il était surtout motivé, à mon avis, par l’aspect « travail manuel en solitaire » et aussi par la très évidente reconnaissance de ses chefs et collègues, dont il était très fier. Il assumera ce travail avec plaisir et sera en recherche permanente de nouveautés (le rêve, partout, toujours).
Il ne saura pas, de son vivant, que la plupart de ses maquettes sont aujourd’hui au musée des Arts et Métiers à Paris, où je les ai vues bien après son décès. Il en aurait tiré grande satisfaction et fierté. Je les ai toutes reconnues sur place, par le plus grand des hasards.
A son travail il est très apprécié car il amuse souvent ses collègues par ses traits d’esprit malicieux, toujours bienveillants et, aussi, leur rend fréquemment de nombreux petits services personnels, à leur demande. Sa position unique de maquettiste dans un immense bâtiment de bureaux est évidemment la cible des collègues qui ont souvent des petits problèmes matériels à résoudre : un collage d’objet personnel par ci, fournir un bout de plastique par là, etc. Il y est donc très populaire.
